Assilah entre histoire millénaire et Street Art contemporain

En vivant en Andalousie, nous avons déjà un pied en Afrique. Ça tombe bien, c’est un continent qui nous fascine et dont le peu que nous avons découvert nous donne envie d’en voir encore plus! Evidemment, c’est énorme, pas toujours facile d’accès et plutôt calibré pour les voyages au long cours. Mais, il y a aussi des endroits idéaux pour des mini-trips et juste à côté de chez nous! Nous parlons bien évidemment de notre voisin le Maroc!

Nous avons déjà effectué un petit trip il y a deux ans, dans les mêmes conditions et nous avons découvert Tanger, les régions de Fès et de Rabat. Cette année, nous allons descendre plus au sud car nous allons rejoindre Stéphanie, la sœur de Van et son chéri Samuel pour une petite aventure en famille à Marrakech.

Comme à chaque fois que nous venons dans la région, nous privilégions les transports terrestres et dominons notre mal de mer en traversant le détroit de Gibraltar avec le ferry depuis Tarifa.

Une fois n’est pas coutume, nous traversons le détroit une fois la nuit tombée, ce qui risque d’augmenter les perceptions foireuses de notre oreille interne. Heureusement, nous avons pu faire tamponner notre passeport par l’immigration marocaine dont les bureaux se trouvent directement à bord, avant le départ du ferry, donc tranquillement, à l’arrêt sans les vagues. En plus, la mer était relativement calme. La traversée s’est donc bien passée et notre mal de mer est resté en sourdine. Nous passons notre première nuit à Tanger afin de déjà nous mettre dans l’ambiance marocaine.

Assilah

Quand nous avons parlé autour de nous à Séville de notre trip au Maroc à venir, on nous a dit à l’unanimité et avec une « alegria » toute andalouse qu’il fallait absolument faire un détour par la petite ville d’Assilah. Même si notre but cette fois-ci se trouvait beaucoup plus au sud, nous avons quand même décidé d’y faire un petit détour. Nous ne pouvions pas ignorer toute l’énergie qui a été mise dans tous ces conseils bienveillants. A voir si nous avons bien fait de les suivre…

La ville d’Assilah se trouve à une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de Tanger au bord de l’océan Atlantique. Il y a une ligne de train qui relie les deux villes mais la gare de Tanger-Ville est assez excentrée. Nous avons donc décidé de prendre les bus urbains. Ils partent de la place Castilla, ils sont bleus, c’est la ligne I2 et ça coûte 8 dirhams (0,74€ ou 0,69 CHF). En vrai, c’est un peu le bordel et ce n’est pas très bien indiqué mais il ne faut pas hésiter à demander les infos aux locaux, ils vous aideront avec plaisir et gentillesse. Le trajet dure environ une heure et longe l’océan Atlantique. D’ailleurs, nous nous sommes pris à imaginer que si nous continuons à suivre la route de la côte jusqu’au bout, nous finirons par arriver au Cap de Bonne Espérance. (Oui, ce genre de trip est un de nos nombreux rêves de voyage!)

La médina

La médina d’Assilah est ceinte d’une superbe muraille admirablement conservée. Il est vrai qu’avec sa situation privilégiée au bord de l’océan Atlantique, elle a attiré les convoitises au fil des siècles. Comme sa voisine Tanger et beaucoup d’autres villes du pourtour méditerranéen, elle a été fondée par les Phéniciens au IIe millénaire avant notre ère. Durant l’Antiquité, elle fut une colonie carthaginoise avant d’être conquise par les Arabes en 712. En 1471, elle fut conquise par les Portugais qui en firent un de leurs nombreux comptoirs sur la route de l’or saharien. C’est de cette époque que datent les fortifications qui entourent la médina. L’architecture n’est d’ailleurs pas sans rappeler les villes d’Essaouira et d’El Jadida, plus au sud mais toujours sur la côte Atlantique et qui ont aussi subi les conquêtes portugaises.

Les siècles suivants virent passer toutes sortes de conflits et Assilah fut dans les mains des différents califats ou sultanats locaux, des Espagnols, des pirates, des Autrichiens, de nouveau des Portugais, etc…

Entre 1912 et 1956, Assilah faisait partie du protectorat espagnol sur le Maroc, comme tout le nord du pays. Mais cette époque n’a quasiment pas laissé de traces visibles dans la ville et nous en sommes un peu surpris. Malgré cette histoire récente et de nombreux touristes espagnols qui viennent en villégiature, Assilah est plutôt restée architecturalement portugaise et linguistiquement francophone.

L’intérieur de la médina possède une ambiance plus arabisante avec ses maisons blanches et bleues et ses portes en forme de serrure qu’on retrouve dans beaucoup de villes côtières marocaines. Après la dynamique Tanger, Assilah paraît presque endormie en comparaison et l’heure de la sieste semble encore plus sacrée qu’au sud de l’Espagne! Même les nombreux chats somnolent paresseusement sous le soleil d’automne en attendant le retour des pêcheurs afin d’aller essayer de choper un ou deux poissons pour leur festin du soir. Ceci s’explique en partie parce que nous sommes en novembre et que c’est la basse saison. Il paraît qu’en été, Assilah se transforme en station balnéaire assez animée.

En parlant de chat, il y en a un qui s’est glissé sans vergogne dans notre séance photo de la médina! (première image ci-dessous)

Street Art

Nous ne le savions pas avant de venir, mais Assilah est la capitale artistique du Maroc. La médina regorge de galeries d’art et surtout, pour notre plus grand bonheur, de Street Art. Il est vrai que les façades blanches sont un support idéal pour ce genre d’exercice. Il y a même un festival de Street Art qui a lieu chaque année depuis 1978! Les peintures sont renouvelées assez régulièrement donc, on peut revenir plusieurs fois à Assilah et découvrir à chaque fois quelque chose de nouveau. Nous avons passé des heures à nous arrêter devant chaque œuvre d’art et nous les avons toutes adorées!

Côté playa

C’est un peu moins le cas en novembre mais un des gros atouts d’Assilah, ce sont ses longues plages de sable au bord de l’océan de l’Atlantique. Elles s’étendent sur des kilomètres au nord et au sud de la ville. Le temps nous a un peu manqué pour les longues balades côtières, nous nous sommes contentés de ce qu’il y avait en ville et c’est déjà pas mal pour les grands amoureux de la mer que nous sommes!

Nous avons bien fait de suivre les conseils de nos amis sévillans! Assilah n’est pas dans les grands circuits touristiques marocains comme Fès ou Marrakech et n’a pas le pittoresque d’Essaouira ou de Rabat (quoique!) mais elle vaut largement le détour depuis Tanger. Nous avons adoré sa douceur de vivre et son côté contemplatif et artistique.

Ça pourrait être un coin idéal pour se ressourcer quelques jours mais pas cette fois, nous sommes attendus de pied ferme beaucoup plus au sud et il faudrait penser à se mettre en route pour d’autres aventures!

Bilan du Maroc

Même si ce n’était qu’un court séjour style vacances plutôt qu’un voyage au long cours, nous allons tout de même vous délivrer un petit bilan de notre tout aussi petit trip au Maroc en novembre 2023.

En chiffres

Durée du séjour

11 jours. Il y aurait de quoi y passer au moins un mois mais nous n’avions pas beaucoup de temps à disposition sur ce coup là.

Budget

6853 dirhams marocains ( 632,30€ / 599,25 CHF) ce qui fait une moyenne journalière de 623 dirhams (57,50 €/ 54,50 CHF). C’est un peu plus haut que notre budget de backpacker mais comme nous n’étions pas en mode backpack, nous trouvons que nous nous en sommes très bien sortis. Dans ce budget, sont également incluses les traversées en ferry de / vers Tarifa qui nous ont coûté un total de 140€.

Distance parcourue

1136 kilomètres. De Tanger – FèsRabat – Casablanca – El Jadida – Casablanca et retour à Tanger. Tous les trajets ont été effectués exclusivement en train, le réseau ferré étant excellent au Maroc. Notre arrivée dans le pays a été faite grâce au ferry qui traverse le détroit de Gibraltar entre Tarifa et Tanger.

Extrêmes d’altitude

432 mètres à Fès au pied du Moyen-Atlas et le niveau de la mer sur la côte Atlantique. Rien de très folichon sachant que le Maroc possède des sommets à plus de 4000 mètres mais, en plein mois de novembre, nous n’avions pas envie de nous les geler à la montagne.

Extrêmes de températures

Sept petits degrés au matin à Fès et 24 degrés lors d’une belle journée ensoleillée à Casablanca. Pour un mois de novembre, c’est correct. Nous savions que nous n’allions pas avoir des températures tropicales!

Notre taux de glycémie durant ce séjour

Nous préférons ne pas le savoir! Les Marocains sont littéralement accros au sucre!

Les flop et les top

Comme d’habitude, nous n’allons pas déroger à la règle de ce qui est top et pas top dans ce pays! Afin de finir sur une note positive, nous allons commencer par le négatif.

Les flop

Notre digestion a eu un peu du mal à s’y faire à la nourriture trop riche et trop sucrée mais à part ça, notre séjour s’est tellement déroulé comme sur des roulettes que nous n’avons rien trouvé de négatif à dire sur le pays. Même le rabattage ne nous a pas dérangé et nous a semblé insignifiant comparé à d’autres endroits comme Bali ou le sud de la Thaïlande.

Trop top!

Le réseau ferré

Nous avons effectué la totalité de nos trajets en train et franchement, c’est le top! C’est fiable, assez confortable, relativement bon marché, parfois rapide et généralement à l’heure. Bon, le seul train qui devait absolument être à l’heure avait une heure de retard et a réduit à néant notre marge à Tanger pour prendre notre ferry de retour. Heureusement, nous avons fini par y arriver après avoir vécu un gros moment de stress.

Entre Tanger et Casablanca, il y a une ligne à grande vitesse et du matériel semblable aux TGV français et ça fonctionne hyper bien! Toutes les informations peuvent se trouver sur le site des chemins de fer marocains (ONCF).

Nous avons testé pour vous : le trajet CasablancaSéville est faisable en une seule journée. Départ à environ 11 heures pour une arrivée vers 19 heures en changeant seulement à Tanger et à Tarifa.

Les gens

L’accueil au Maroc est juste exceptionnel! Le peuple marocain est d’une gentillesse incroyable. C’est vrai qu’après la crise du Covid-19 et le tremblement de terre de septembre 2023, les Marocains sont tout contents de voir de nouveau des touristes. Mais nous y avons déjà été une fois en 2017 et les gens étaient déjà trop sympas! En plus, ils parlent parfaitement français, ou espagnol à Tanger. La communication se fait donc hyper facilement!

La gastronomie

Eh oui, encore un bilan où nous parlons de bouffe! Bien qu’elle soit beaucoup trop riche pour nos pauvres petits estomacs fragilisés par une nourriture quotidienne trop saine, la cuisine marocaine est trop bonne avec tout plein d’épices qui donnent tout plein de saveurs sans que ce soit trop piquant. Nous avons d’ailleurs ramené du ras el hanout dans nos bagages! De notre premier voyage marocain, plus au sud, nous n’avons pas un souvenir impérissable de la gastronomie. Cette fois-ci, au nord, nous la trouvons excellente. Est-ce que nos goûts ont changé ou est-ce vraiment différent d’une région à l’autre? S’il y a des experts en la matière parmi vous, nous serions curieux d’avoir votre avis à ce sujet.

Rabat

Rabat n’est pas forcément la première ville à laquelle on pense quand on envisage un voyage au Maroc. Fès et surtout Marrakech sont beaucoup plus connues. Pourtant, c’est pour la capitale marocaine que nous avons eu un véritable coup de cœur! Il y a le dynamisme d’une grande ville tout en ayant une certaine douceur de vivre et les quartiers historiques sont juste magnifiques!

Bizarreries marocaines

Tout ce sucre!

Nous ne savons pas comment font les Marocains pour ingurgiter tout ce sucre! Les pâtisseries sont excellentes mais vite écœurantes après deux bouchées tellement elles sont sucrées! Le thé à la menthe nous donne la bouche pâteuse tellement il y a de sucre dedans! Nous avons d’ailleurs fini par aller le boire dans des coins plus touristiques où c’est moins un sacrilège de demander notre thé sans sucre.

C’était un trop court séjour mais nous l’avons tout de même apprécié! C’est fou de se dire que nous pouvons changer de continent en à peine trois heures depuis Séville par voie terrestre!

Nous devons tout de même émettre un petit bémol mais qui n’a rien à voir avec le Maroc à proprement parler. Avec tout l’art mudéjar que nous pouvons trouver en Andalousie, les villes marocaines nous ont semblé similaires aux nôtres. Le paysage du nord marocain semi aride avec des oliviers à perte de vue ressemble à s’y méprendre à celui de notre belle région. Les gens parlent parfaitement l’espagnol, notre langue de tous les jours, ou le français, notre langue maternelle. Les trains sont exactement les mêmes que les TGV français et il y a des magasins Carrefour dans chaque zone commerciale. A part pour quelques petits détails, nous n’avons pas du tout été dépaysés et avons été un peu déçus de cet état de fait!

Evidemment, nous vous recommandons tout de même le Maroc comme destination de voyage. Il y en a pour tous les goûts : villes impériales, désert, montagne, mer, etc. C’est un pays où nous nous sommes sentis totalement en sécurité, même Van quand elle s’y est baladée toute seule! Et par rapport à l’Europe hors Andalousie, ça reste quand même un petit dépaysement à juste quelques petites heures d’avion de la France, la Suisse ou la Belgique.

Casablanca et la cité portugaise d’El Jadida

Depuis Rabat, nous continuons notre route encore plus au sud! Que voulez-vous, c’est notre point cardinal préféré! Nous ne changeons pas une équipe qui gagne et reprenons notre moyen de transport préféré et le plus pratique au Maroc : le train. Il y a évidemment l’Al Boraq (le TGV marocain) qui relie les deux plus grandes villes du pays en un temps record mais nous avons choisi l’option slow travel avec le train de banlieue qui nous a amenés à destination en un peu plus d’une heure.

Comme pour la capitale, il y a la subtilité des gares à Casablanca. La gare principale est Casa-Voyageurs qui est la gare TGV et qui est excentrée. Si vous voulez être près du centre, la gare appropriée est Casa-Port mais qui n’est pas desservie par la ligne à grande vitesse. Au pire, il y a un très bon réseau de tram qui vous emmènera au centre depuis Casa-Voyageurs.

Notre but se situe encore plus au sud mais il est plus pratique est meilleur marché de dormir à Casablanca. C’est la plus grande ville du pays ainsi que son centre financier le plus important. C’est également la plus grande ville du Maghreb et la cinquième d’Afrique. Elle n’a pas bonne réputation au niveau touristique car, comparé à toutes les merveilles que compte le Maroc, elle n’offre que très peu d’intérêt. Casablanca a été bombardée presque entièrement lors des insurrections de 1907 et a été reconstruite au cours du XXe siècle dans un style moderniste assez moche. Rien à voir avec les joyaux architecturaux des villes impériales qui font la renommée du Royaume Chérifien!

Mais vous nous connaissez : tant que ce n’est pas trop craignos, nous adorons allez fouiner dans tout ce qui a mauvaise réputation!

Place Mohamed V

Nous commençons notre visite en passant par l’impressionnante place Mohamed V. Elle se situe au cœur du quartier administratif de Casablanca. Elle a été érigée juste après la Première Guerre Mondiale par les Français au début de leur protectorat sur le Maroc. Ce n’est pas la place la plus pittoresque que nous ayons vue mais c’est un endroit où la population locale (et tous les pigeons de la région apparemment!) vient flâner au coucher du soleil et l’ambiance y est assez sympa.

Parc de la Ligue Arabe

Casablanca est une grande ville un peu étouffante. Nous avons donc été contents d’y avoir trouvé un parc avec un peu de verdure. Ce parc de trente hectares a été aménagé par les Français en 1921. A l’époque, il s’appelait Lyauthey en l’honneur du maréchal Hubert Lyauthey qui fut un des acteurs principaux de la colonisation du royaume chérifien. Après l’indépendance, il prit le nom de la Ligue Arabe.

En bordure du parc, se dresse l’église du Sacré-Cœur érigée en 1930, toujours par les Français évidemment, dans un joli style art-déco. Sa façade est d’une blancheur immaculée comme beaucoup de bâtiments de la ville. Elle a été désacralisée et accueille aujourd’hui des expositions et des manifestations culturelles.

La médina

Même si ça ne vaut de loin pas Fès ou Rabat, Casablanca possède une modeste médina qui vaut le détour. C’est l’endroit idéal si vous voulez voir un vrai souk, c’est-à-dire un marché complètement anarchique où on y vend des denrées alimentaires, des habits ou de l’huile d’argan à la criée et pas des stands « d’objets artisanaux locaux made in China ». D’ailleurs, en tant que rares touristes nous n’intéressons pas trop les vendeurs et nous traversons la vieille ville sans être trop dérangés.

La médina se trouve à l’emplacement de l’ancienne ville portugaise et de l’ancien quartier juif. On peut y voir les restes de la muraille qui entourait la ville sur quatre kilomètres. Bref, Casablanca ne vaut pas le détour pour sa médina mais si vous y êtes déjà, allez y faire un tour, vous y trouverez un peu de Maroc « authentique ».

Grande mosquée Hassan II

S’il y a bien un incontournable à Casablanca, c’est la mosquée Hassan II! Elle date de 1993, a été érigée en partie sur l’océan et occupe un espace de plus de neuf hectares! Elle est nommée d’après Hassan II, le précédent roi et père du roi actuel et son minaret culmine à plus de deux cents mètres. C’est une des plus grandes mosquées du monde! Le minaret est d’ailleurs le plus haut du monde. Sa salle de prière peut accueillir 25’000 fidèles et l’esplanade plus de 80’000 personnes. En un mot : impressionnant!

La couleur dominante de la mosquée est le vert, couleur de l’islam qui a été utilisée dans les mosaïques décoratives que nous trouvons particulièrement belles.

Un des points de vue sympa sur la mosquée est la corniche, une jolie promenade au bord de la mer. Ça permet aussi de prendre un peu d’air marin et d’échapper à la pollution de la ville. Mais en ce mois de novembre, malgré une météo assez clémente et ensoleillée, l’océan Atlantique est déchaîné et nous recevons des embruns vraiment glacés! D’ailleurs, la mosquée elle même souffre de l’humidité et des caprices de l’océan et son entretien s’avère un vrai défi.

El Jadida

Si nous nous sommes arrêtés à Casablanca, c’est pour aller visiter El Jadida située à une centaine de kilomètres plus au sud. Les deux villes sont très bien reliées par le train et il faut compter une heure et demie de trajet. Par contre, la gare d’El Jadida est située à cinq kilomètres de la forteresse et il n’y a pas de transports publics. Evidemment, une horde de taxi vous attend à l’arrivée du train et c’est sûrement assez facile à négocier mais nous décidons d’y aller à pied, c’est tout plat et il y a des trottoirs partout. Pour le retour, nous avons trouvé, après moult recherches, un bus qui nous a rapproché de la gare mais nous avons quand même dû parcourir le dernier kilomètre à pied.

La cité portugaise de Mazagão

El Jadida a été fondée par les Portugais au XVIe siècle sous le nom Mazagão francisé en Mazagan. Toute la cité entourée par les remparts est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. Les bâtiments datent de la Renaissance portugaise dans un style dit manuélien, du nom de Manuel Ier, roi du Portugal de l’époque. L’ensemble est un peu défraîchi mais ne manque pas de charme, bien au contraire! Le coin n’a pas encore succombé au tourisme de masse et le centre n’a pas été transformé en musée et en Airbnb. La population locale est vraiment adorable et toute contente de pratiquer un peu de français avec nous. Même les enfants nous accueillent avec des joyeux « Bonjour »! Nous avons d’ailleurs été hallucinés par leur très bon niveau dans la langue de Molière alors que certains d’entre eux doivent avoir juste huit ans!

Les lieux de culte

Une des particularités de la cité d’El Jadida c’est que, sur la place centrale, la grande mosquée fait face à l’église catholique Notre-Dame de l’Assomption. Cette dernière date du XVIe siècle comme le reste de la cité et possède l’architecture typique de la Renaissance Portugaise. Elle est encore en activité aujourd’hui et la messe y est parfois donnée en français. Quant à la mosquée, elle a été construite au début du XIXe siècle après le départ des Portugais.

Cette place est un très bel exemple de tolérance religieuse.

Les remparts

La cité d’El Jadida est, encore aujourd’hui, entourée de remparts superbement conservés. On les doit évidemment aux Portugais qui ont fortifié la ville dès sa construction au XVIe siècle. Le truc vraiment cool à faire c’est de se promener sur la muraille d’où on a une superbe vue sur la vieille ville, sur le port et sur l’océan Atlantique.

Nous avons eu un véritable coup de cœur pour El Jadida! Même si c’est assez petit et ne nécessite qu’une petite journée de visite, ça vaut amplement le détour. Casablanca nous a bien plu aussi. Certes ce n’est pas pittoresque mais la ville a une vraie âme et nous y avons été sensibles.

El Jadida sera le point le plus méridional de notre trip marocain. Nous avions pensé descendre jusqu’à Marrakech. Le festival du film qui fait monter les prix des logements, un estomac un peu en vrac et un timing un peu serré nous y ont fait finalement renoncer. Nous avons décidé de rentrer au bercail. D’ailleurs, nous avons testé pour vous : Casablanca – Séville se fait parfaitement en une journée par voie terrestre. Départ à 11 heures tapantes de la gare de Casa-Voyageurs et arrivée à 19 heures à la station de bus de Plaza de Armas. Bon, nous avons eu un gros coup de stress à Tanger car notre TGV avait une heure de retard ce qui a bien réduit notre marge de manœuvre. Mais nous avons finalement pu prendre notre ferry comme prévu et rentrer sans encombre dans notre chère capitale andalouse.

Rabat, entre dynamisme moderne et traditions séculaires

Nous quittons Fès et la montagne sans trop de regrets avec notre moyen de transport préféré : le train. Cette fois, le trajet n’est pas trop long et le train relativement confortable. Nous sommes par contre hallucinés par le paysage : avec ses collines recouvertes d’oliviers, la région ressemble à s’y méprendre à notre Andalousie de tous les jours! Nous ne sommes pas encore assez au sud pour voir les magnifiques paysages désertiques qui font la renommée du Maroc.

Petite info pratique pour le train : si vous voulez visiter la ville demandez un billet pour la gare de Rabat-Ville qui est assez bien centrée, sinon on aura tendance à vous vendre un titre de transport pour Rabat-Agdal qui est la gare TGV et qui est un peu excentrée. Ça ne change pas vraiment le prix du ticket mais ça pourrait vous induire en erreur.

Arrivés à Rabat, l’ambiance change complètement! La douceur de l’océan Atlantique nous fait déjà gagner quelques degrés et c’est bien agréable en ce mois de novembre. Nous sommes ici dans la capitale du royaume et ça se voit. Même le quartier de la gare est beau, propre, agréable et tout neuf. Des deniers que perçoit le royaume chérifien, c’est Rabat qui se sert en premier!

La médina et le souk

Toute la partie historique de Rabat est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. Contrairement à notre attente, le quartier du souk n’est pas trop touristique et il ne s’y vend pas des babioles pour touristes mais plutôt des affaires de tous les jours pour les locaux. Les stands de bouffe ont également la part belle par ici. La médina date du Xe siècle et a été fondée par les Almoravides, les mêmes qui occupaient l’Andalousie à l’époque musulmane, mais elle ne prit son essor qu’au XIIIe siècle. Malgré la fraîcheur du mois de novembre, le rythme de vie dans la médina ressemble beaucoup à nos étés andalous. C’est très calme pendant la journée, voire même fermé à certains endroits pour mieux se réveiller entre les deux appels à la prière du coucher du soleil. Le seul hic est qu’il est difficile de se repérer dans les ruelles bordées de façades blanchies à la chaux, nous avons l’impression qu’elles se ressemblent toutes!

La kasbah des Oudayas

Cette splendide forteresse qui surplombe l’océan Atlantique nous vient également des Almoravides et date du XIIe siècle. Mais ce sont les Almohades, une tribu berbère à qui on doit notamment nos alcazars de Séville et de Jerez de la Frontera, qui en firent une place militaire forte et qui envoyèrent des soldats continuer la conquête de la péninsule ibérique. Au XVIIe siècle, le roi Philippe III expulsa tous les musulmans d’Espagne dont une bonne partie vint se réfugier à l’intérieur de la kasbah. Les nouveaux venus en firent un état indépendant : la république de Bouregreg du nom du fleuve au pied des remparts qui, aujourd’hui, sépare la ville de Rabat à celle de Salé. Cette république était un repaire de corsaires et de pirates qui venaient vendre des prisonniers chrétiens. Les remparts sont d’une conservation incroyable et l’architecture almohade, bien que familière pour nous, est juste magnifique.

Borj es-Squala

Adossé à la kasbah des Oudayas, ce bâtiment militaire pourrait nous faire penser à certaines de nos forteresses espagnoles comme à Cádiz. Il y a un peu de cette influence puisque une bonne partie des musulmans ayant fui l’Andalousie après la Reconquista sont venus se réfugier à Rabat. Mais en vrai, ce fortin est typiquement arabe, en témoignent la forme de ses créneaux . Il date du XVIIe siècle et fut érigé par la dynastie Alaouite, la famille qui règne encore sur le Maroc de nos jours.

L’intérieur de la kasbah

L’intérieur de la kasbah est un peu plus aseptisée pour les touristes et possède quelques magasins de souvenirs. Mais franchement, ce n’est pas du tout exagéré et les vendeurs nous laissent tranquilles. Avec l’air de l’océan tout proche, se promener dans les petites ruelles est beaucoup moins oppressant qu’à Fès et nous sommes autant émerveillés par tous les détails architecturaux, notamment les nombreuses portes qui ont cette forme de serrure typiquement islamique.

Le clou du spectacle

Se promener sur les remparts permet aussi d’avoir une superbe vue sur l’océan Atlantique, sur l’embouchure du fleuve Bouregreg et sur l’autre rive, la ville de Salé, qui sert un peu de station balnéaire de Rabat. Nous sommes en novembre donc les ombres sont très allongées et l’océan est un peu tourmenté mais ça n’enlève rien à la beauté de la vue.

Le jardin d’essais botaniques

Vous commencez à nous connaître : dès que nous découvrons une tâche verte sur une carte, nous allons voir ça de plus près! Ce jardin a été fondé en 1991 par l’institut agronomique et vétérinaire du Maroc dans le but de conserver des espèces rares ou menacées du pays. Il y a plus de 700 espèces endémiques, sur plus de 3000 au total, réparties dans les diverses zones du jardin. Même si Rabat n’est pas du tout étouffante, ça fait quand même un bien fou de se promener au milieu des arbres sans aucun véhicule à proximité.

La tour Hassan

C’est LE symbole de la ville de Rabat! A la fin du XIIe siècle, le sultan Yacoub El Mansour, un peu mégalo sur les bords, projetait de construire la plus grande mosquée du monde. Mais il mourut en 1199 et son projet resta inachevé. En plus, le grand tremblement de terre de Lisbonne de 1755 détruisit une bonne partie de ce qui avait été construit. Aujourd’hui, il nous reste l’esplanade avec les ruines des colonnes qui devaient soutenir la mosquée ainsi que la tour inachevée qui se dresse quand même à quarante-quatre mètres de hauteur. Si ce minaret vous semble familier, c’est normal! Ses modèles ont été la mosquée Koutoubia de Marrakech ainsi que notre seule et unique Giralda de Séville! Il paraît même qu’il y a exactement les mêmes rampes d’accès à l’intérieur afin de permettre au muezzin de se rendre au sommet à cheval afin de faire ses appels à la prière.

Malgré l’inachèvement de la mosquée et les ruines, le lieu est encore utilisé comme lieu de culte aujourd’hui. Nous sommes d’ailleurs arrivés un vendredi juste après la grande prière et nous avons vu des centaines de fidèles sortir de l’esplanade par les deux petites portes que compte le complexe. Oui, nous avons toujours le don des timings chelous!

Au nord de l’esplanade se dresse un magnifique bâtiment d’architecture islamique. C’est le mausolée royal ou reposent les dépouilles du roi Mohammed V (le grand-père du roi actuel), le prince Moulay Abdallah (l’oncle du roi actuel) ainsi que le roi Hassan II (le père du roi actuel).

Rabat a été notre gros coup de cœur du Maroc. Nous avons été séduits par la richesse du patrimoine historique mais aussi par le dynamisme de la ville moderne. Rabat est une petite capitale, ce n’est que la deuxième ville du pays après Casablanca, et il y règne une douceur de vivre assez agréable. La ville est ouverte sur l’océan, elle n’est ni étouffante, ni congestionnée par le trafic. Il est très facile d’y être piéton. Pourtant, la ville est également moderne, dynamique avec une offre culturelle intéressante et les habitants sont vraiment adorables. A notre avis, Rabat est une étape incontournable de tout voyage dans le royaume chérifien.

Fès, la capitale spirituelle du Maroc

Pour se déplacer au Maroc, rien ne vaut le train! C’est facile, pratique, généralement à l’heure et relativement bon marché. A Tanger, la gare se trouve à environ trois kilomètres de la médina et il est facile d’y négocier un taxi qui vous y emmènera pour 20 ou 30 dirhams ( 1,80 / 2,75€ ou 1,75 / 2,60 CHF). Nous y avons été à pieds car nous avons fait un détour par la rue où habitait la famille de Fabien à l’époque du protectorat espagnol. C’est tout à fait faisable en marchant, la ville est très piétons friendly et les quartiers extérieurs de la ville ne sont pas du tout craignos.

La solution la plus rapide aurait été de prendre l’Al Boraq, le train à grande vitesse dont les rames sont exactement les mêmes que les TGV français, jusqu’à Kénitra puis changer pour un train normal jusqu’à Fès. Nous avons préféré prendre le train direct Tanger – Fès. Ben nous n’avons pas eu l’idée du siècle sur ce coup là. Ce n’est pas très confortable, ça n’avance pas et le paysage n’est pas très bucolique. Après quatre heures de trajet, nous arrivons enfin à Fès.

Nous décidons de nous dégourdir les jambes en rejoignant la médina à pieds depuis la gare. Décidément, ce n’était pas la journée des bonnes idées ce jour-là! Certes, la ville est autant piéton friendly que Tanger avec de grands trottoirs bien aménagés mais c’est loin, au bord de routes à grand trafic et c’est surtout mal plat! Nous sommes trop bien habitués à Séville qui est une ville sans aucun relief! Mais nous avons appris la leçon et avons pris un taxi pour redescendre à la gare. Les taxis officiels de Fès sont rouges et ils ont un compteur qu’il faut demander d’enclencher. Evidemment, lorsque nous avons demandé à notre chauffeur de mettre en route le sien il s’est mis en mode « Moi Français comprendre pas! » alors qu’il nous avait accueillis dans une langue de Molière quasi parfaite et qu’il écoutait une radio francophone dans sa voiture. Mais nous n’avons pas lâché l’affaire et il a fini par l’allumer son compteur. Le trajet nous a coûté 9,50 dirhams (0.85€ ou 0.80 CHF)

Fès est la troisième ville du Maroc et fait partie des quatre villes impériales du pays avec Meknès, Rabat et Marrakech. Ce qui veut dire qu’elles ont été, à un moment donné de leur histoire, la capitale du royaume chérifien. On considère également Fès comme la capitale spirituelle du Maroc à cause de la grande concentration de mosquées dans sa médina. Le centre-ville à l’intérieur des remparts est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Bab Boujloud

Bab Bouljoud est une des portes d’accès à la médina de Fès et une des plus connues. Elle date du XIIe siècle et est recouverte de mosaïques bleues représentant la couleur de la ville. Une fois passé cette porte, on se retrouve dans un souk qui vend beaucoup de camelote pour touristes et dont les vendeurs, à notre grand étonnement, ne sont pas trop portés sur le rabattage. Même Van qui a été se promener toute seule dans les ruelles de la médina un après-midi ne s’est pas trop faite embêter.

La médina abrite également les célèbres tanneries de peau qui servent à la fabrication du cuir qui fait la réputation de Fès. Nous avions évidemment prévu d’aller voir ça de plus près mais l’accès se fait par des terrasses privées dont l’entrée passe par les magasins d’articles en cuir tenus par une véritable mafia qui ne te laisse pas passer si tu n’as pas au moins acheté douze de leurs babioles. Nous savons que le fait de discuter, vendre, négocier fait totalement partie de la culture arabe mais nous avons horreur de cette façon de faire quand il s’agit d’essayer de pigeonner quelques touristes un peu trop naïfs. Bref, vous l’aurez compris, nous y avons renoncé. Nous avions déjà vu les tanneries de Marrakech et pour être honnêtes, ce n’est pas très pittoresque et l’odeur en émanant est juste abominable!

La médina

La partie la plus ancienne de la médina date du VIIIe siècle. Elle se situe au pied du Moyen-Atlas au croisement de routes commerciales de grande importance et était reliée à toutes les villes islamiques importantes de l’époque comme Bagdad, Samarcande, Palerme, Kairouan et bien sûr, notre belle Córdoba. La ville a participé à l’âge d’or intellectuel de la civilisation islamique dont en témoignent encore aujourd’hui un grand nombre d’universités.

On nous a dit que la médina possède 490 ruelles. Nous ne savons pas si c’est exact ou si c’est un peu exagéré pour impressionner le touriste lambda mais il y en a effectivement beaucoup de ces petites rues et il est très facile de s’y perdre! Prévoyez une application maps avant de vous y promener! Pour être honnêtes, nous avons trouvé la médina et son labyrinthe de ruelles très serrées très oppressants et nous n’avons pas apprécié tous les palais ainsi que tous les architecturaux à leur juste valeur.

Bab Mahrouk et la muraille occidentale

Nous sommes enfin sorti de l’étouffante médina pour aller admirer les remparts depuis l’extérieur. Nous sommes ici dans la partie ouest de la médina qui date du XIIIe siècle. Les remparts n’ont rien de très exotiques pour nous puisqu’ils sont identiques aux alcazabas qu’ont peut retrouver dans nos villes andalouses mais ça n’enlève rien au fait qu’ils sont impressionnants et super bien conservés. La place Mahrouk qui longe les remparts est un grand espace ouvert et beaucoup plus respirable que la médina. On peut y observer les premiers reliefs du Moyen-Atlas, le cimetière historique ainsi que le fort de Borj Nord. Au coucher du soleil, les familles se réunissent sur la place afin de profiter des derniers instants de « chaleur » avant la froideur de la nuit.

Jnan Sbil

Nous n’allions pas louper un des seuls espaces verts de la ville! Cette petite oasis de verdure de 7,5 hectares date du XVIe siècle mais la version que nous pouvons observer aujourd’hui date du XIXe siècle. Le jardin se situe directement au pied de la médina et, même si ce n’est pas le parc le plus pittoresque que nous ayons visité, il vaut la peine d’y faire un petit détour juste pour voir des arbres, quelque chose de différent à Fès ainsi que les superbes mosaïques qui décorent le jardin.

Nous n’avons pas super accroché avec Fès. Oui, la ville est superbe, son patrimoine architectural est incroyable et son histoire est très riche, nous devons le reconnaître. Mais nous nous sommes sentis mal à l’aise dans cette médina bien trop serrée et étouffante. Nous avons également trouvé la ville trop « montagnarde ». Certes elle ne culmine « qu’à » 579 mètres d’altitude. Pour nous qui avons vécu dans les Alpes, c’est pratiquement la plaine! Mais contrairement aux villes ouvertes sur l’océan, nous la trouvons un peu repliée sur elle-même et plus conservatrice qu’ailleurs. C’est vrai que Fab y a été un peu malade et nous avons eu froid, ça n’a sûrement pas aidé à améliorer notre jugement.

La logique aurait voulu que nous visitions Meknès, la petite sœur de Fès située à une cinquantaine de kilomètres de là. Mais après la petite déception de Fès, nous avons choisi d’y renoncer. Nous n’avons, pour une fois, pas un temps extensible et nous voulons rejoindre la côte où nous espérons avoir des températures un peu plus douces.

Tanger, la porte d’entrée de l’Afrique

Quand on habite dans le sud de l’Espagne et surtout en Andalousie, une partie de notre histoire est intimement liée à l’Afrique du Nord. Ça faisait longtemps que nous voulions traverser le détroit de Gibraltar, lieu stratégique de notre région depuis l’Epoque Romaine pour aller découvrir ce qui s’y passe plus au sud et pour voir à quelle point notre passé est similaire.

Novembre étant un moins assez calme pour nous, nous avons sauté sur l’occasion afin de partir à la découverte d’une partie du Maroc. C’est un pays dont nous avons eu un premier aperçu dans la région de Marrakech en 2017, juste avant notre départ en tour du monde et dont nous en gardons une image plutôt positive. D’ailleurs, pour ceux qui nous suivent depuis le tout début, vous avez sûrement vu passer des articles à ce sujet. Suite à la refonte de ce blog, ils ont temporairement disparu! Nous allons les réécrire et les republier très bientôt, promis!

Bref, tout ça pour vous dire que nous avons finalement traversé le détroit de Gibraltar. Nous nous sommes rendus à Tarifa, à l’extrême sud de l’Europe continentale pour prendre un ferry qui nous emmène en à peine une heure à Tanger. La traversée coûte 40€ (38,65 CHF) par personne. Il y a la possibilité de partir depuis Algeciras pour un tarif beaucoup plus avantageux mais le ferry vous débarquera au port de Tanger Med qui comme son nom l’indique se situe en mer Méditerranée à 45 kilomètres plus à l’ouest de Tanger Ville qui se situe sur l’Atlantique directement au pied de la kasbah. La solution d’Algeciras peut toutefois être une bonne alternative si vous avez un véhicule.

Petite précision pour les personnes qui , comme nous, souffrent du mal de mer. Prenez vos précautions! Le bureau de douane marocaine se trouve sur le ferry et il est obligatoire d’y faire tamponner son passeport avant le débarquement à Tanger. Ce qui veut dire qu’il faut rester debout à faire la queue alors qu’on navigue sur un détroit souvent bien agité. Quand on a notre oreille interne qui fait des siennes, c’est loin d’être le top! Heureusement pour nous, nous avons pu embarquer bien avant le départ et nous avons pu passer la presque totalité du temps d’attente sur une embarcation à l’arrêt qui ne bougeait pas. Nous avons donc pu nous asseoir confortablement au hublot pour la traversée et être au premières loges, à l’arrivée, pour apercevoir un magnifique dauphin qui se prélassait dans les eaux tranquilles du port de Tanger!

En arrivant à Tanger, nous débarquons dans un port situé au pied d’une forteresse datant du temps des Arabes. C’est exactement la même image que nous avons eue en partant de Tarifa! Quand nous disions que nos histoires étaient liées! Avec ses maisons blanchies à la chaux et ses petites ruelles, Tanger peut faire penser aux Pueblos Blancos d’Andalousie.

Tanger

Même si ça nous démange d’aller explorer le Maroc plus en profondeur, nous nous arrêtons tout de même une journée à Tanger pour différentes raisons. Pour Fabien, ce périple a tout d’un pèlerinage familial puisque sa maman et ses tantes, que nous embrassons bien fort, sont nées dans cette ville à l’époque du protectorat espagnol.

Tanger a l’air d’une ville relativement modeste mais ne vous y trompez pas! C’est le deuxième poumon économique du pays après Casablanca. Sa position privilégiée sur le détroit de Gibraltar, ses activités portuaires autant sur l’océan Atlantique qu’en mer Méditerranée ainsi que son commerce florissant avec l’Europe en font une ville riche et dynamique. A part les minarets qui nous indiquent que nous avons changé de culture, nous n’avons pas vraiment l’impression d’avoir débarqué en Afrique.

La medina

Tanger a une histoire de ouf depuis la nuit des temps et ça se ressent dans l’âme de la ville et dans les ruelles de la médina. Ce sont les Phéniciens qui ont fondé la ville, comme Cádiz située presque en face, ce qui veut dire que Madame fête plus de trois mille ans d’histoire, de guerres, de conquêtes et aussi de prospérité. Au IVe siècle avant Jésus-Christ, la ville devint un important comptoir carthaginois qui profitait déjà de sa position privilégiée sur le détroit de Gibraltar. A la chute de Carthage, la ville intègre le royaume de Maurétanie (avec un « é », à ne pas confondre avec la Mauritanie, avec un « i », qui est le pays plus au sud) un royaume berbère qui devint ensuite une province romaine. Après un bref passage dans l’empire byzantin ainsi qu’une petite invasion des Wisigoths, Tanger se fait prendre par les Ommeyades de Damas qui en firent leur point de départ pour aller conquérir la péninsule ibérique. Divers royaumes arabes se sont disputés Tanger durant les siècles de domination musulmane. Puis, au XVe siècle, Tanger connut aussi sa Reconquista! Pas par les rois d’Aragon comme en Espagne mais par les Portugais qui ont quand même dû s’y prendre à trois fois avant de s’en emparer! Ces derniers la cédèrent à l’Angleterre deux siècles plus tard comme dot pour le mariage royal anglo-portugais en 1661. Mais les Anglais n’en profitèrent pas et trouvèrent son occupation inutile et trop coûteuse. (c’est de l’humour anglais certainement!) Ils la cèdent donc à l’Empire Chérifien de l’époque qui correspond plus ou moins au Maroc actuel.

A la fin du XIXe siècle, toutes les puissances coloniales européennes se disputent le Maroc et plus particulièrement Tanger toujours à cause de sa position stratégique. Ce qui amène à pléthore d’accords et de traités plus ou moins respectés jusqu’en 1923 où les négociations aboutissent enfin et où Tanger devient une zone internationale affranchie des droits de douane. La ville possède son autonomie financière et est administrée internationalement par le Maroc, les puissances coloniales européennes ainsi que par les Etats-Unis. En 1940, le général Franco, dictateur de l’Espagne qui possède déjà un protectorat sur tout le nord du Maroc s’empare de Tanger pour permettre à son allié, l’Allemagne nazie, d’y installer un consulat et d’en faire une base arrière. En 1945, sous la pression des Alliés, Franco doit se retirer et Tanger redevient une ville internationale jusqu’en 1956 où le Maroc obtient enfin son indépendance.

Si vous avez eu le courage de lire tout notre pavé, félicitations! Mais l’histoire est trop passionnante pour qu’on y passe à côté. C’est surtout l’aspect de ville internationale qui nous a fasciné! Même si nous savons pertinemment que c’était quand même une forme de colonisation.

Vous pouvez maintenant profiter des photos de la médina. Elle date principalement des différentes périodes arabes mais on peut quand même noter quelques influences européennes. Elle est construite sur un grand promontoire rocheux qui domine l’océan. Ce qui en fait un endroit très mal plat! Donc munissez vous de bonnes chaussures ainsi que d’une bouteille d’eau pour pour profiter à fond des petites ruelles toutes plus belles les unes que les autres!

La kasbah

Au Maghreb, une kasbah signifie une citadelle fortifiée. C’est l’équivalent de nos alcazabas espagnoles. Celle de Tanger est assez récente puisqu’elle ne date que du XVIIe siècle. Certes, la ville a eu été fortifiée auparavant mais les murailles qui nous restent datent de l’époque du sultan Moulay Ismail, celui qui a récupéré Tanger après le départ des Britanniques. La grimpette pour accéder à la kasbah par les ruelles de la médina se mérite mais elle vaut la peine. Les murailles sont magnifiques et la vue sur le port, la baie et, par beau temps, sur la côte espagnole est superbe.

Côté mer

Même si les principaux intérêts de Tanger restent la médina et la kasbah, il peut être agréable de se promener au pied des remparts, en bord de mer. Avec la construction du port de Tanger Med situé quarante-cinq kilomètres plus à l’est qui, avec sa capacité de neuf millions de containers, est le plus grand port industriel d’Afrique et de Méditerranée, le port de Tanger Ville s’est reconverti en port de pêche et port de plaisance bordé de restaurants de poissons et c’est assez sympa! Tanger se trouve un petit peu en retrait du détroit de Gibraltar, côté Atlantique dans une baie abritée, ce qui la dispense des forts vents comme à Tarifa. On peut clairement distinguer sur les bâtiments du fronts de mer qui datent du début du XXe siècle les influences françaises et andalouses.

Tanger n’a pas le prestige des villes impériales marocaines plus connues mais elle mérite tout de même une visite. Nous devons quand même reconnaître que pour le dépaysement, on repassera. Depuis que nous vivons en Andalousie, les maisons blanches et l’architecture mudéjar font partie de notre quotidien. (Oh les gros blasés!) Heureusement qu’il y a les tajines et les appels à la prière qui nous rappellent que nous avons quand même changé de pays et de continent!

Il est totalement possible d’y passer une journée en faisant l’aller-retour depuis Tarifa en fast ferry. Il faut compter une petite heure pour la traversée même si la publicité vous fait croire que le trajet ne dure que trente-cinq minutes! Pour que ce soit le cas, il faut que la mer soit calme comme un lac. Avec les forts courants qui balaient constamment le détroit, ça n’arrive jamais!