Zaragoza est une superbe ville mais la région Aragon a beaucoup d’autres choses à offrir. Nous n’aurons pas le temps de tous les découvrir car nous planchons déjà sur nos projets estivaux qui sont, pour l’instant, assez prometteurs mais il y a déjà quelques pépites facilement accessibles que nous avons été explorer.

Huesca

Rejoindre la petite ville de Huesca depuis Zaragoza, c’est facile. C’est accessible en une petite heure de train depuis la capitale régionale. Par contre, ce n’est pas le trajet le plus bucolique qui soit : c’est affreusement plat et il y a une énorme zone industrielle qui semble ne jamais vouloir prendre fin. Peu à peu, l’urbanisation laisse place à d’immenses champs de blé à perte de vue. Apparemment, la province de Huesca est le grenier à blé de l’Espagne. On se croirait plus dans les plaines du Midwest qu’à quelques encablures des Pyrénées.
Huesca est une petite ville encore située dans la plaine de Zaragoza mais d’où on peut déjà apercevoir les premiers versants des Pyrénées. La population locale n’est pas plus chaleureuse que dans la capitale. Ma foi, c’est le nord. Voilà, passer pour des touristes en Espagne pour cause de « trop du sud » ça c’est fait. Mais ce n’est de loin pas le pire : il fait plus de 35 degrés, il y a une vrai torpeur estivale et l’heure de la sieste n’est même pas respectée! WTF??

Centre historique

Malgré sa mentalité un peu bizarre, Huesca possède un magnifique centre historique. On y retrouve toujours ces hautes maisons aux fenêtres rectangulaires mais le cœur de la ville est resté très médiéval. Contrairement à Zaragoza ou d’autres villes d’Aragon comme Teruel, il n’y a pas d’art mudejar à Huesca car la période arabe a duré moins d’un siècle. La ville est assiégée par Louis le Pieux, roi d’Aquitaine et fils de Charlemagne dès l’an 797 déjà avant d’être conquise, en 1096, par Pierre Ier d’Aragon qui en fit la capitale du premier royaume d’Aragon élargi.








Nous avons été frappé par le nombre d’églises alors que la ville n’est vraiment énorme! Nous avions fait le même constat à Orihuela tout au sud de la Communauté Valencienne mais là-bas les gens ont l’air de s’en ficher comme de leur première paire de chaussettes tandis que dans la région le catholicisme a l’air d’être beaucoup plus respecté. Nous n’avons pas de preuve formelle pour étayer notre théorie, c’est juste une forte impression, mais ça pourrait expliquer la mentalité un peu plus fermée des Aragonais. Tout ce que nous avons trouvé à ce sujet est le fait que les rois d’Aragon sont surnommés « Rois Catholiques ». Ceci est dû au fait que ce sont eux qui ont initié la Reconquista qui a chassé les Arabes de la péninsule ibérique ou qui les a forcé à se convertir au christianisme et qui a permis à l’Espagne de redevenir catholique.





Cathédrale Seo de Santa Maria

Le clou du spectacle d’une visite à Huesca est indubitablement la cathédrale. Elle se situe au sommet d’une petite colline sur la Plaza de la Catédral (sans blague!) et a été construite entre les XIIIe et XIVe siècles dans le plus pur style gothique. Architecturalement, les deux plus grandes villes d’Aragon se complètent bien : Zaragoza la baroque mudéjar et Huesca la gothique!





Huesca est une jolie petite étape en Aragon et nous avons adoré son caractère encore très médiéval. Une petite journée de visite suffit amplement surtout que la ville est bien desservie depuis Zaragoza.
Canfranc

Vu que nous avons déjà effectué un sacré trajet en direction du nord et que nous nous sommes approchés des Pyrénées, autant pousser le vice encore plus loin! Surtout qu’il y a une superbe ligne de chemin de fer depuis Huesca qui traverse des paysages somptueux dont les Mallos de Riglos, d’impressionnantes formations géologiques qui dateraient d’il y a 23 millions d’année et dont nous avons essayé d’en faire une vidéo potable sur nos stories instagram. Le trajet dure 2 heures 30 depuis Huesca, respectivement 3 heures 30 depuis Zaragoza mais le temps passe vite à regarder par la fenêtre. Nous en avons fait des voyages en train dans notre vie mais celui-là mérite une jolie place dans notre top 5 des trajets les plus bucoliques!

Canfranc est située au cœur des Pyrénées, tout au nord de l’Aragon à quelques encablures de la frontière française située 7 kilomètres plus haut sur le col de Somport, ou au milieu du tunnel routier qui passe sous la montagne. C’est une station de montagne typique avec ses maisons en pierre et ses bâtiments pour colonies de vacances mais qui dégage tout de même une ambiance de bout du monde. Perché à 1200 mètres d’altitude, le village bénéficie d’un climat assez doux malgré sa situation en fond de vallée. Ceci est dû à sa situation sur le versant sud de la chaîne de montagne.




Gare internationale de Canfranc

Ce superbe bâtiment néoclassique aux dimensions hors norme est l’ancienne gare internationale de Canfranc. C’était le point frontière sur la ligne ferroviaire Pau – Zaragoza. Le bâtiment de la gare est aussi grand que la gare Saint-Lazare de Paris mais se trouve dans un bled perdu au fin fond des Pyrénées. La ligne a été inaugurée en 1928 mais a atteint son apogée au début des années 1940 à la réouverture de la frontière franco-espagnole car les gares frontières d’Irun (côté Atlantique) et de Port Bou (côté Méditerranée) ont été détruites durant la Guerre Civile Espagnole. Une intense activité du trafic marchandise a eu lieu pendant la Deuxième Guerre Mondiale pour le transport de minerai de fer et de tungstène depuis une Espagne « neutre » pour l’Allemagne nazie. En échange, les Allemands envoient de l’or aux Espagnols. La ligne est aussi utilisée par des Juifs et des Résistants fuyant la France.
Le trafic des voyageurs n’a jamais vraiment connu de grand succès. Le trajet était long et il fallait obligatoirement changer de train à Canfranc à cause des formalités douanières et la différence d’écartement des rails entre la France et l’Espagne. Ce dernier à son propre écartement qui pose encore parfois quelques problèmes aujourd’hui malgré les travaux de mise aux normes européennes pour les lignes à grande vitesse.

La ligne transfrontalière a définitivement été fermée côté français en 1970 après un accident de train provoquant la destruction d’un pont près du village de Lescun. Aujourd’hui, divers riverains excédés par le trafic de camions et associations réclament une remise en service de la ligne. Mais s’il y a bien un gros défaut de la France au niveau ferroviaire, c’est de s’en foutre complètement des petites lignes régionales. C’est vraiment dommage car il y aurait un vrai potentiel touristique.
Côté espagnol, la ligne est toujours en service même si ce n’est que pour deux trains par jour. Le bâtiment de la gare est, quant à lui, en plein chantier de rénovation, d’où nos photos bien pourries, sorry… A terme, il devrait accueillir un hôtel de luxe ainsi qu’un petit musée retraçant l’histoire de la ligne. Les Espagnols ont toujours espoir de voir le trafic transfrontalier reprendre un jour.



Tunnel ferroviaire de Somport

C’est dans ce tunnel que les trains franchissaient la frontière franco-espagnole lors de l’exploitation de la ligne ferroviaire Pau – Zaragoza. Il a été achevé en 1915 soit 13 ans avant l’inauguration de la ligne et est encore en état de fonctionnement aujourd’hui.En attendant une hypothétique réouverture de la ligne ferroviaire, il constitue le tunnel d’évacuation et de secours pour le tunnel routier de Somport.
Si vous regardez attentivement le bas relief situé en dessus de l’entrée du tunnel, vous pouvez remarquer qu’il a l’air de manquer quelque-chose entre les deux lions. Ce n’est pas qu’une impression! Il y avait, à cet emplacement, un bouclier orné de l’aigle de Saint-Jean symbole de l’Espagne franquiste. Même si Franco est mort en 1975 et son régime fasciste avec, son emblème n’a été enlevé qu’en 2019!



Côté nature

Nous ne nous sommes quand même pas farci sept heures de train aller-retour juste pour une gare! Quoique pour Fab l’argument ferroviaire aurait suffi. Nous sommes dans les Pyrénées et sur le chemin de pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle autant aller voir ce que la nature nous réserve. Nous qui avons grandi dans les Alpes, il nous semble logique de voir des pins et des sapins à cette altitude. Oui, il y en a mais plus haut et pas en majorité. Nous traversons plutôt une superbe forêt de feuillus qui déploie de jolies couleurs vert tendre du printemps.





Les bunkers de Franco

Lors de notre petite rando, nous sommes tombés sur plusieurs bunkers qui ne datent pas, comme on pourrait le supposer, de la Guerre Civile Espagnole (1936-1939) mais de juste après, dans les années 1940! Les bunkers de Canfranc font partie d’une large ligne de défense de près de 2000 édifices qui court tout le long des Pyrénées. Officiellement, le général Franco, le dictateur sanguinaire et complètement taré qui a malheureusement gagné la guerre civile, craignait une invasion des Allemands. En réalité, il craignait surtout les troupes anti-franquistes exilées qui se serait formées et organisées de l’autre côté de la frontière. Finalement, la menace s’est avérée inexistante et ces bunkers n’ont jamais été utilisés. Ils ont néanmoins été scrupuleusement entretenus jusque dans les années 1960 puis laissés à l’abandon à la merci de la végétation. C’est un incendie de forêt dans les Pyrénées catalanes en 2012 qui a permis de redécouvrir certains bâtiments. D’autres ont ensuite été mis à jour dans un but purement touristique et historique.






Nous savons que l’Espagne regorge d’histoire dans n’importe laquelle de ses régions mais nous ne nous attendions pas à en trouver une aussi fascinante dans une vallée presque perdue des Pyrénées. Et nous n’avons fait que de la survoler! Canfranc est un endroit vraiment idéal pour ceux, comme nous, qui aiment mixer la nature avec des visites culturelles.