Portobelo et ses forteresses espagnoles

Ayant vu l’entrée du canal de Panama côté Pacifique, nous avons évidemment super envie d’aller voir l’autre embouchure côté Atlantique à Colón, la deuxième ville du pays. Mais tout le monde nous déconseille fortement d’y aller, ce serait super moche et même un peu dangereux. Nous nous disons que les locaux connaissent mieux leur pays que nous et décidons de leur faire confiance et nous renonçons donc à notre projet. Mais tout n’est pas perdu pour autant : après l’étude de la carte, nombre de discussions avec la population locale et quelques recherches nous tombons sur la petite localité de Portobelo situé dans une baie au nord-est du pays. Nous n’hésitons pas longtemps, surtout qu’en tant qu’andalous, le nom ne nous est pas inconnu vu que nos histoires sont liées. Vous verrez à quel point quelques paragraphes plus bas.

Nous n’allions quand même pas renoncer à ces eaux turquoises, non?

Depuis le terminal de bus de la city, il faut prendre le bus pour Colón et s’arrêter dans la petite ville de Sabanitas. Depuis là, fini les grands bus confortables et climatisés, c’est le retour des Chicken bus colorés et de leur musique assourdissante! Mais ça va tellement mieux avec l’ambiance toute caribéenne du coin! En tout, le trajet nous aura pris un peu plus d’une heure, donc ça vaut vraiment la peine d’y faire un saut depuis la capitale! Bon, le retour a été un peu plus scabreux, le trafic était infernal pour rentrer dans Sabanitas, nous n’avons pas eu notre correspondance tout de suite et les bus étaient blindés. Soit nous avons eu de la chance à l’aller, soit c’était particulièrement le bordel au retour. Quoi qu’il en soit, il vaut vraiment la peine d’effectuer la petite centaine de kilomètres qui séparent la capitale de Portobelo.

Le retour des Chicken bus!

Portobelo

Le bâtiment de la douane et le village vue du fort San Jeromino

Nous n’avons effectué qu’un saut de puce depuis Panama City, et pourtant, nous avons changé d’océan, changé d’ambiance et presque changé de planète! Ici, l’ambiance est toute caribéenne, même plus créole que latino-américaine! Ca se ressent dans la cuisine, dans l’ethnie locale, dans la musique et dans la nonchalance de la population locale. Nous nous croyons plus dans les petites Antilles qu’au Panama et ce changement d’ambiance nous plait beaucoup!

Portobelo a été découverte par Christophe Colomb himself lors de son quatrième voyage en Amérique, celui où il est parti de Cadiz et arrivé in extremis à Bocas del Toro. Il a tellement été subjugué par la baie, ce que nous comprenons amplement, qu’il a nommé le lieu Porto Bello, ce qui, en italien, signifie « beau port ». Oui, en italien car il ne faut pas oublier que, bien qu’il fût parti d’Espagne pour le compte de la couronne espagnole, le fameux explorateur était génois!

Aujourd’hui, le nom a été hispanisé en Portobelo mais il porte toujours aussi bien son nom avec ses petites maisons colorées et sa grande douceur de vivre.

Fuerte San Jeromino

Dès le XVIe siècle, Portobelo devint rapidement le principal port espagnol des Amériques. C’est d’ici que partaient les embarcations remplies d’or et d’autres objets pillés par les colons en direction du port de Séville. Evidemment, un port aussi bien situé voyant passer des richesses venant de tout l’empire colonial attiraient bien des convoitises, dont celles du fameux pirate anglais Francis Drake qui arriva bien déterminé à saccager la ville mais qui mourut de fièvre avant d’avoir pu mener à bien son projet. Il fallait donc bien protéger la baie et, pour ça, les Espagnols étaient les maîtres en la matière!

Le fort de San Jeromino, situé dans l’actuel centre-ville, date du XVIe siècle et adopte l’architecture typique de tous les forts espagnols de cette époque. Il a bien fait son boulot car Portobelo resta invaincue jusqu’en XVIIe siècle, même quand les Britanniques, ont essayé à plusieurs reprises de l’attaquer, sans succès, durant les différentes guerres qui ont opposé les deux pays. Mais en 1739, la ville finit par être prise par l’amiral anglais Edward Vernon mettant fin à son âge d’or. Suite à cet épisode, Les Espagnols préférèrent prendre la route maritime du cap Horn et des Philippines précipitant le déclin de Portobelo. Déclin qui durera jusqu’à l’ouverture du canal de Panama à 50 kilomètres de là.

Pour nous, être à Portobelo après avoir adopté le sud de l’Andalousie comme chez nous a une saveur un peu particulière. Nous avons visité l’Archivo General de Indios à Séville et avons pu lire quelques documents d’époque parlant de ces traversées et des marchandises qui étaient ramenées depuis le Nouveau Monde. Malgré l’horreur de l’histoire coloniale, le sujet nous a fasciné. Nous retrouver aujourd’hui de l’autre côté de l’Atlantique au départ de toutes ces navigations, c’est juste fou!

Pour ne rien gâcher, la vue sur la baie de Portobelo et sur le bleu turquoise de la mer des Caraïbes est juste magnifique!

Fuerte Santiago de la Gloria

Ce fort-ci se trouve un peu à la sortie de la ville en direction de Colón. Il est situé un peu plus stratégiquement que celui de San Jeromino car à l’entrée de la baie. Il est également un peu plus grand et mieux conservé, sûrement car il a été renforcé au XVIIIe siècle. Sinon, il a été construit à la même époque (XVIe siècle) et possède exactement le même style architectural. Portobelo était tellement prospère et convoitée que deux forteresses n’étaient pas de trop pour la protéger.

D’après les quelques pierres que nous avons pu voir et le relief un peu bizarre de la forêt derrière le fort, nous soupçonnons fortement que d’autres vestiges se cachent dans le coin. Mais Portobelo se trouve entre un parc national et une réserve marine protégée, il n’y aura donc pas d’autres fouilles archéologiques. Et c’est très bien aussi! Que la nature reprenne ses droits, surtout qu’elle est particulièrement belle par ici!

Là non plus nous n’allons pas bouder notre plaisir d’avoir une superbe vue sur la mer des Caraïbes!

A noter que l’accès aux deux forts est gratuit et ça fait du bien au budget dans un Panama pas si bon marché que ça.

Bonus sunset

Normalement, la côte caribéenne américaine se situe à l’est, donc du mauvais côté pour les couchers de soleil. Oui, du bon côté pour les levers de soleil mais ça implique de sortir du lit à des heures indues, ce qui nous coûte beaucoup! Mais le Panama, avec sa forme de fer à cheval tordu (oui, c’est comme ça que nous le voyons!), possède un peu de côte ouest sur les Caraïbes. Evidemment, à Portobelo, le soleil se couche derrière la seule île de la baie! Même si ce n’est pas le sunset du siècle, ça donne quand même de jolies couleurs.

Si le paradis existe vraiment, il doit ressembler à Portobelo. Un village paisible à l’histoire fascinante dans un écrin naturel de folie! D’ailleurs, la faune nous a honoré de sa présence avec des singes hurleurs, des oiseaux incroyables et des poissons volants se faisant courser par un dauphin. Ce dernier point peut paraître loufoque écrit comme ça mais nous vous assurons que c’est vraiment impressionnant!

Si vous êtes à Panama City, faites absolument le détour à Portobelo, ce n’est vraiment pas loin et ce serait presque un crime de passer à côté devant tant de beauté et de douceur de vivre!

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