Après notre coup de cœur pour Segorbe, nous avions vraiment envie d’explorer un peu plus cette magnifique vallée de la Palancia. Mais nous avons attendu que les grosses chaleurs de cette fin août cessent un peu car, oui nous aimons le chaud, mais marcher à 40 degrés sous un soleil de plomb, ce n’est pas idéal. Comme les températures ont fini par bien se rafraîchir, nous avons rechaussé nos baskets et sommes partis à l’aventure! Par « températures fraîches », nous entendons un bon 28 degrés. Nous sommes en Méditerranée, il ne faut pas trop pousser dans la fraîcheur quand même!

Nous avons repris la pittoresque ligne de train qui relie Valence à Teruel puis Zaragoza et nous avons été un peu plus loin de notre périple tout en restant dans les limites de la Communauté Valencienne. Nous nous sommes arrêtés dans la petite localité de Jérica, située au pied de la Sierra de Espadan, plus très loin de la frontière avec l’Aragon.

Jérica

Jérica nous séduit par ses petites ruelles et son caractère qui est resté très médiéval grâce à quelques maisons en pierre bien conservées. Mais le village a d’abord été musulman, comme c’est souvent le cas dans la région. D’ailleurs, le nom « Jérica » nous vient directement de l’arabe et signifie « flanc oriental d’une montagne ». Par contre, la conquête catholique s’est faite un peu plus tôt qu’ailleurs dans la région, au XIe siècle déjà. Nous devons la conquête de Jérica à Rodrigo Diaz de Vivar, un célébre leader militaire de Castille plus connu sous son surnom de « Cid ». Pour la petite histoire, Cid est également un nom arabe qui signifie « seigneur ». Malgré cette prise de pouvoir chrétienne, les musulmans ne furent pas expulsés jusqu’au XVIIe siècle. Le fameux Jaime I est également passé par là pour conquérir la ville afin de l’offrir à son fils Jaime II pour en faire un petit royaume indépendant et une zone franche. Une situation qui perdura jusqu’au XVe siècle quand Jérica fut finalement rattachée à la couronne espagnole.









Santa Agueda la Nueva

Enfin un bâtiment religieux qui n’est pas coincé au milieu de minuscules ruelles! Cette église a même droit à sa propre place : la « Plaza de la Iglesia » et se laisse observer des passants. Elle a été construite en 1385 sous le règne des rois d’Aragon et est de style typique gothique valencien. Pendant la Guerre Civile Espagnole (1936-1939), elle a été très abîmée et a dû être détruite pour être reconstruite intégralement à l’identique quelques années plus tard grâce à la Direction générale des régions dévastées mise en place par le général Franco à la fin de la guerre. C’est un peu difficile à avaler qu’on doit cette superbe reconstruction au pire dictateur que l’Espagne ait connu mais au moins, le patrimoine historique a pu revivre.




Torre mudéjar de las Campanas

Difficile de louper cet édifice qui domine totalement le village! Cette superbe tour octogonale a été construite en 1616 sur la base d’une autre tour antérieure qui date de l’époque romaine. La petite forteresse à son pied date du XIXe siècle et a été construite comme muraille défensive pendant les guerres carlistes. Elle est de style mudéjar (ou maure) qui est le terme qui détermine les musulmans qui sont restés en Espagne après la conquête catholique dont l’art est unique en son genre. Cette tour est le seul édifice de ce style qui nous reste dans toute la Communauté Valencienne.




Le château

Jérica ne déroge pas à la règle du château sur la colline. Ce sera donc notre grimpette du jour! Mais l’effort en vaut la peine. Nous traversons une superbe pinède qui domine les petites gorges du rio Palancia et la Sierra de Espadan nous toise avec son relief incroyable!
Au sommet, il ne reste qu’une petite tour appelée judicieusement « la Torreta » (petite tour, tiens donc!). Jérica était un endroit stratégique dans le couloir qui relie Valence à Teruel, il était donc logique qu’une forteresse y trouve sa place. La construction du château date du XVe siècle et a vu défiler les divers rois d’Aragon. Il a été détruit pendant les guerres carlistes du XIXe siècles mais la destruction du château a permis de mettre à jour des vestiges archéologiques remontant jusqu’à l’Epoque Romaine. Au pied du château, se trouvent les ruines de l’ermitage de San Roque datant de la même époque et connaissant le même destin.





La Vuelta de la Hoz

C’est une petite réserve naturelle toute proche du centre du village. Elle fait partie du parc naturel de la Sierra de Espadan qui couvre toute la région. C’est idéal pour observer les immenses paroi de roche calcaire façonnée par l’érosion. C’est le meilleur endroit de toute la Communauté Valencienne pour observer la faune et la flore de montagne méditerranéenne. Nous avons d’ailleurs pu apercevoir quelques beaux spécimens de rapaces ainsi qu’une maman chamois avec son petit.
Le Rio Palancia

La réserve naturelle de la Vuelta de Hoz est en plein cœur de la Vallée du Rio Palancia. Ce petit fleuve, long de 85 kilomètres prend sa source dans la Sierra del Toro, un peu plus à l’est pour se jeter dans la mer Mediterranée entre Sagunto et Canet, même si, en cette saison, il s’assèche lors de son arrivée en plaine. A Jérica, il forme une petite gorge dans la Sierra de Espadan avant de retrouver un aspect totalement sauvage.





Notre petite randonnée du jour

La petite balade de la Vuelta de la Hoz nous ayant mis en appétit, nous décidons d’aller explorer, avec nos jambes, encore un peu plus cette vallée vraiment sympa. Nous commençons notre tour à travers des oliviers centenaires dont les champs sont arrosés grâce à un système d’irrigation qui ne sont pas sans rappeler les fameux bisses valaisans.





Le paysage se fait ensuite plus sec : une vraie garrigue méditerranéenne! Mais l’érosion a fait un superbe travail sur les roches calcaires de la région!






Quelques petites grottes viennent égayer un peu le paysage à l’instar des « Cuevas de Gallur ». Ce sont juste des particularités géographiques, elles n’ont pas été creusées par l’homme pour un usage particulier.


Enfin, ayant plus ou moins résisté à l’assaut du temps et des divers conflits, se dresse, au milieu de nulle part, une petite tour arabe datant du XIIe siècle et sobrement appelée « La Torre » (la tour).

Viver

Notre balade nous emmène au petit village voisin de Viver. Il est moins pittoresque que Jérica mais ses petites ruelles bordées de façades blanches immaculées nous donne déjà un avant-goût d’Andalousie. Sinon l’histoire reste la même : les arabes, Jaime I puis la couronne espagnole. Le village a presque entièrement été détruit lors de la Guerre Civile (1936-1939) car c’était un haut lieu de combats entre les Franquistes et les Républicains.





Viver ne possédant pas de gare, nous avons dû retourner à pied à Jérica pour pouvoir prendre notre train du retour. Mais dans un panorama pareil, ça ne nous a pas gêné le moins du monde! Le timing ne nous a juste pas permis d’explorer plus en profondeur le village. Mais comme ce ne sera sûrement pas notre dernier passage dans le coin, nous y reviendrons sûrement…
Nous sommes bien contents d’avoir suivi notre instinct pour aller découvrir cette belle vallée plus en profondeur! Le mois de septembre s’annonce propice à ce genre de petites escapades. Nous avons d’ailleurs des tonnes d’idées en réserve et comptons bien profiter des trésors que nous offre cette magnifique région dans les jours à venir.
3 réflexions sur « Jérica et sa tour mudéjare »