Georgetown, entre traditions multiculturelles et vie trépidante moderne

A Ipoh, nous avons cette fois pensé à contrôler la validité de nos billets avant d’embarquer pour le bus. Ouf, ils ont été émis pour la bonne date! Nous mettons un peu plus de deux heures de route dans un véhicule super confortable pour rejoindre Butterworth, la petite ville sur le continent qui fait face à l’île de Penang. De là, il nous faut prendre un ferry pour traverser le chenal qui sépare Georgetown de la péninsule malaise. C’est super facile, que ce soit le train, le bus ou le ferry, tout se trouve dans le même terminal et tout y est superbement indiqué. La traversée nous prend environ vingt minutes et depuis l’embarcation nous pouvons déjà observer la belle vue sur la skyline de Georgetown et sur les montagnes verdoyantes qui la dominent.

Dès que nous posons nos pieds sur Penang, nous sentons tout de suite que l’ambiance est complètement différente du reste du pays. Les Chinois sont clairement en grande majorité. D’ailleurs, l’état de Penang est le seul état de Malaisie à ne pas avoir de majorité malaise. C’est une ville un peu à part, nous ne sommes plus vraiment en Malaisie mais nous ne sommes non plus pas complètement en Chine. L’islam est beaucoup moins présent qu’ailleurs dans la vie quotidienne. Mais en déambulant dans la vieille ville coloniale, nous remarquons vite, qu’à l’instar du reste du pays, Georgetown est une ville très multiculturelle et que les trois principales communautés (Chinois, Malais et Hindous) ont leurs quartiers et leurs traditions culturelles et religieuses sont respectées dans toute la ville.

Centre colonial

La ville a été fondée en 1786 par le capitaine Francis Light au nom de la Compagnie Anglaise des Indes Orientales. Oui, c’est un nom un peu pompeux c’est vrai mais il fallait bien justifier les atrocités coloniales sous un nom un peu plus respectable. Le marin baptisa le lieu Georgetown en l’honneur du roi Georges III qui régnait sur l’Empire Britannique à l’époque. Grâce à son emplacement stratégique à l’entrée du détroit de Malacca, les Anglais en firent rapidement un comptoir très prospère même s’il finit par se faire doubler par Singapour, autre port stratégique également sous domination britannique.

Aujourd’hui, la ville continue de prospérer grâce à l’industrie des semi-conducteurs et aussi un peu grâce au tourisme, notamment en provenance de Chine. Georgetown est connu pour son centre historique riche en bâtiments coloniaux datant de cette faste époque britannique. Il est d’ailleurs inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. Certaines maisons ont été superbement rénovées, d’autres moins, mais toutes possèdent un certain charme et il est très plaisant de déambuler à l’ombre, sous leurs arcades, si elles ne sont pas trop encombrées par les scooters, un fléau à Georgetown.

Mosquée Kapitan Keling

Construite par des Indiens musulmans au XIXe siècle, c’est la plus ancienne mosquée de Penang. Elle se situe en plein quartier indien dans une rue peuplée principalement de Tamouls musulmans appelés Chulias. D’ailleurs son nom signifie en malais « capitaine indien ».

Nous étions en train d’admirer ce superbe édifice de loin quand un imam nous invita à rentrer pour visiter l’intérieur de la mosquée. Notre premier réflexe fut de refuser à cause de notre tenue inappropriée mais on nous prêta des habits de circonstance : un sarong pour Fab et une djellaba à capuche pour Van.  A l’intérieur, une bénévole nous fit le tour du propriétaire et nous autorisa même à prendre des photos de la salle de prière! Nous avons appris, entre autres, que tous les musulmans devaient apprendre l’arabe afin de déchiffrer le coran et réciter les prières, que si la salle de prière pour femmes était séparée de celle des hommes c’était pour qu’elles puissent se dévêtir à l’abri des regards pour effectuer leurs ablutions et que les heures de prières étaient calculées par rapport au soleil. Enfin, nous vous dévoilons un secret de moins  en moins bien gardé : avec les technologies actuelles, le muezzin n’est  même plus obligé de grimper au sommet du minaret pour effectuer son appel à la prière, il le fait tranquillement dans une salle de la mosquée à l’aide d’un micro. Nous avons vraiment apprécié la visite et sommes toujours touchés par la tolérance des Malais musulmans et par leur envie de faire connaître leur culture aux étrangers sans vouloir nous rallier à leur cause.

The Jetty

Un des quartiers de Georgetown situé directement sur le chenal qui sépare l’île de Penang du continent, est un petit village de pêcheurs sur pilotis. Si certains de ses habitants, d’origine chinoise pour la plupart, vivent au gré des courants marins pour aller pêcher ou récolter des coquillages à marée basse, d’autres n’ont pas hésité à transformer leur salon en boutique de souvenirs pour touristes. Même si le village n’est pas aussi pittoresque et authentique que Kampong Ayer au Brunei, il offre une belle ouverture sur la mer ainsi qu’un joli point de vue sur le détroit et sur la ville de Butterworth, en face, sur le continent.

Juste à côté de la Jetty, se trouve un énorme food-court où toutes les différentes cuisines de Malaisie et même d’ailleurs sont représentées. Georgetown essaie de rivaliser avec Ipoh pour le titre de capitale malaisienne de la gastronomie. Pour être honnêtes, nous ne saurions donner notre préférence à une de ces deux villes, nous avons trouvé la nourriture succulente partout. Georgetown peut juste se targuer d’avoir son propre laksa, la soupe de nouille malaisienne et plat national. Par contre, nous préférons la variante « Sarawak » avec son curry, même s’il arrache beaucoup plus.

Nous avons adoré la ville de Georgetown, son architecture coloniale, sa tolérance, son multiculturalisme et, bien entendu, sa gastronomie! (#irrécupérables) Nous déplorons juste le trafic anarchique au centre-ville qui rend le centre historique pas du tout piétons friendly et qui lui enlève un peu de charme. Nous avons préféré Malacca, certes plus petite et plus calme mais plus piétonne et où les bâtiments historiques sont plus mis en valeur.

Mais Penang , ce n’est pas que Georgetown, c’est une île qui regorge sûrement de quelques trésors qui valent le détour et nous allons nous atteler à les découvrir ces prochains jours.

Ipoh : entre histoire coloniale, street-art et traditions chinoises

Nous adorons Kuala Lumpur et nous pourrions y rester des semaines sans nous y ennuyer une seule seconde mais nous commençons vraiment à y prendre trop nos aises. Il est donc temps de changer un peu d’horizon et de découvrir encore quelques petits trésors malaisiens. Nous allons donc acheter des billets de train et embarquons dans le convoi à l’heure indiquée sur ces fameux billets à la recherche de nos numéros de siège. Mais nous trouvons deux personnes assises à nos places et, après moult délibérations, nous nous rendons compte qu’on nous a vendu des billets à une date erronée. Mince alors! Comme nous n’avons pas du tout envie de descendre du train et de négocier un échange de billets, nous trouvons deux autres places et essayons de jouer les touristes perdus au cas où on nous demanderait quelque-chose. Mais personne n’a rien vu et nous avons pu voyager tranquillement jusqu’à notre destination : Ipoh. Pour des anciens cheminots comme nous, voyager sans titre de transport valable est un peu une honte mais comme dit le dicton : ce sont les cordonniers les plus mal chaussés. Et promis, nous vérifierons mieux nos billets la prochaine fois!

Centre colonial

Ipoh a été fondée dans les années 1845, en pleine colonisation britannique, au cœur de la Kinta Valley, une vallée fertile. La ville connut un gros boom économique dans les années 1920 – 1930 avec la découverte de gisements de fer dans les montagnes des alentours. Elle fut ensuite brièvement occupée par les Japonais durant la Seconde Guerre Mondiale mais vite reprise par les Anglais. Dans les années 1970, l’exploitation minière commença à montrer des gros signes de faiblesse et Ipoh connut un fort déclin dont elle ne se relèvera jamais totalement. La ville resta un peu abandonnée à elle-même et loin du miracle économique de Kuala Lumpur malgré son emplacement privilégié à mi-chemin entre la capitale et Penang. Donc, ici il n’y a ni gratte-ciels flambant neufs à l’horizon, ni vie urbaine trépidante mais un superbe centre historique colonial relativement bien conservé, au charme suranné où le temps semble s’être arrêté. Il y a même une tour de l’horloge typiquement anglaise dont le carillon mélodieux nous rappelle les beffrois d’Europe du Nord.

Chinatown

La deuxième communauté de Malaisie mais la première à Ipoh et dans l’état du Perak en général, a pris ses quartiers dans Concubine Street et ses voisines appelées respectivement 2nd Concubine Street et 3rd Concubine Street. C’est très rationnel, à la chinoise! On y trouve les échoppes typiques de babioles Made in China ou de médecine traditionnelle, les incontournables stands de street food, et un temple bouddhiste chinois. La cuisine Hokkien (nom donné à la communauté chinoise de Malaisie et de Singapour) d’Ipoh serait d’ailleurs une des meilleures de Malaisie voire du sud-est asiatique. C’est difficile d’avoir un avis objectif car tout est bon dans ce pays quelle que soit la communauté qui cuisine, mais il est vrai que nous nous sommes régalés durant notre petite étape à Ipoh.

Street Art

Ipoh, à l’instar de Georgetown ou Malacca, est connue pour ses grandes fresques murales peintes sur les façades de quelques rues du centre-ville. On y retrouve des scènes de vie quotidienne des différentes communautés ainsi que des peintures un peu plus abstraites et artistiques. C’est d’ailleurs à Ipoh que nous avons trouvé les plus jolies formes de street-art de toute la Malaisie.

Kinta River

La rivière Kinta coule en plein-centre ville d’Ipoh. C’est un coin privilégié des locaux qui y pratiquent la pêche, le cours d’eau étant très poissonneux. Il est possible de s’y promener sur les petits chemins qui bordent ses rives. C’est une vraie oasis de verdure mais surtout d’ombre de fraîcheur car le soleil tapait fort lors de notre passage. Une multitude d’oiseaux et de papillons multicolores se laissent observer dans le coin. Nous sommes toujours hallucinés de la diversité de la faune en milieu urbain en Malaisie! Un superbe pont datant de l’époque coloniale enjambe la rivière dans le centre historique.

Mosquée Panglima Kinta

Avec ses façades blanches immaculées et ses coupoles bleues, nous pourrions nous croire quelque part dans les Cyclades. Eh non, nous sommes bien en Malaisie devant une mosquée construite à la fin du XIXe siècle par un lord local. Elle se situe sur les rives de la Kinta et porte d’ailleurs son nom. Son architecture mixe différents styles notamment colonial britannique, Mughal (indo-islamique comme le Taj Mahal) et néoclassique. C’est une mosquée plutôt modeste pouvant accueillir environ 400 personnes mais nous l’avons trouvé très jolie.

Ipoh a été une étape vraiment sympa et surtout très calme après la trépidante Kuala Lumpur! Nous vous recommandons chaudement une petite étape à Ipoh afin de déambuler dans les ruelles tranquilles du centre historique ou de Chinatown. Bien sûr, plusieurs arrêts dans les différents food-courts de la ville s’imposent, la gastronomie locale étant, à raison, reconnue internationalement. Par contre, ne vous y attardez pas plus que nécessaire. C’est assez petit, ça se visite facilement en une bonne journée et on s’y ennuie assez vite.

Quant à nous, ce pays nous fascine encore plus à chaque découverte et Ipoh n’a pas dérogé à la règle. Nous allons continuer notre route en direction de l’île de Penang et de la ville de Georgetown afin de découvrir encore plus de trésor de Malaisie.